Faut-il un statut juridique spécial ?
C’est la sociologie qui la première a fait apparaître l’expression de « famille recomposée » en parlant de ces couples qui se forment en ayant, au moins l’un des deux, déjà des enfants. Et quand les ex en font autant de leur côté, ça fait des grandes familles recomposées ! Si elles sont aujourd’hui complètement entrées dans le paysage sociétal, le statut juridique du « beau parent » n’existe pas. Mais est-ce vraiment nécessaire ?
Evidemment, ça ne se passe pas toujours très bien. Cendrillon avait quelques déboires avec sa belle-mère et Blanche-Neige n’a pas non plus été gâtée de ce côté-là. Mais dans la plupart des cas, ce sont de vrais liens affectifs qui se créent entre les nouveaux conjoints, concubins, partenaires de PACS et les enfants. Au-delà du lien sentimental, faut-il reconnaître un lien juridique ? Le vocable « beau parent » est absent de la loi. Faut-il l’y inscrire au risque d’une part de créer de la confusion – cette terminologie vaut pour les liens par alliance (art. 206 du code civil) – et d’autre part de réduire le champ actuel de la loi ? En effet, la définition du tiers comme l’entend la loi (art. 371-4 du code civil) comprend les « beaux-parents » puisqu’il s’agit d’une personne qui a « résidé de manière stable avec lui et l’un de ses parents, a pourvu à son éducation, à son entretien ou à son installation, et a noué avec lui des liens affectifs durables ». Cette définition est suffisamment large et précise pour recouvrer les situations qui se rencontrent en pratique.
L’intérêt de l’enfant
La seule question qu’il convient de se poser est : « quel est l’intérêt de l’enfant » ? Créer un statut particulier risque de créer des difficultés entre les parents et le « beau-parent » d’autant plus qu’un tel statut serait source de droit pour le tiers, mais aussi d’obligations notamment financières. Autant dire que les tribunaux ne désempliraient pas de ces nouveaux conflits et contentieux ! Quel intérêt pour l’enfant ?
En outre, élargir le nombre de personnes habilitées à prendre des décisions pour l’enfant, alors même que l’enfant a ses parents, risque également de compliquer le quotidien de chacun : de l’enfant, des adultes, et encore une fois, des avocats et juges aux affaires familiales.
Le tiers est la réponse la plus complète
La notion de tiers permet finalement de recouvrir toutes les situations : celles des beaux-parents, mais aussi des parrains et marraines, et de toutes les personnes investies durablement dans la vie de l’enfant.
En outre, il existe déjà des mécanismes juridiques qui permettent de souder encore un peu plus ces familles recomposées : la délégation-partage d’autorité parentale et l’adoption simple par exemple. L’avantage est que dans ces deux cas, ce sont les parents qui décident d’accorder une place à ce tiers en le faisant entrer dans le cercle familial.
Et en cas de séparation l’article 371-4 du Code civil permet de maintenir des liens entre ce tiers et l’enfant.
C’est finalement la famille de cœur qui est consacrée par cette notion juridique du tiers puisque c’est un lien réel, affectif et pérenne que le code civil reconnaît et qu’il maintient au-delà des aléas de la vie sentimentale des adultes. Toujours, dans l’intérêt de l’enfant.