Quand peut-on quitter la maison sans risque ?
C’est une situation ubuesque : ils ne s’aiment plus, ils sont manifestement sur le point d’engager une procédure de divorce, l’un des deux dort déjà dans le salon / la chambre du fils aîné qui fait ses études à l’étranger / la baignoire… Bref, une séparation est en cours et c’est à qui aura le premier le courage de frapper à la porte d’un avocat. Pourtant, ils restent sous le même toit de peur de se voir reprocher un abandon de domicile conjugal. Quel est le risque ?
L’abandon de domicile conjugal est effectivement une faute que l’on peut invoquer dans un divorce pour faute. Mais est-ce suffisant ? Il convient d’en avoir un peu plus dans sa besace pour partir à la bagarre ! Quitter la maison un ou deux mois avant de comparaître devant le juge atténue très fortement la portée de ce grief. Et si la partie adverse n’a que cet os à se mettre sous la dent, on peut dire qu’elle n’a pas grand chose !
Mais filons l’hypothèse… Admettons que la faute soit reconnue. Elle n’engagerait alors aucune conséquence sur les sujets fondamentaux de la prestation compensatoire, du montant de la pension alimentaire pour les enfants ou même de la résidence des enfants. La seule possibilité qui s’offre à la partie qui l’invoque serait de demander des dommages et intérêts. Encore faut-il être en mesure de prouver qu’il y a eu un préjudice réel ! On comprend bien que la partie n’est pas gagnée… Et, pour aller au bout de la démonstration, le montant des dommages et intérêts serait très mesuré. Le jeu en vaut-il vraiment la chandelle ?
Partir, c’est aussi éviter l’enfer
Depuis 2004, le rôle du juge n’est plus d’autoriser la séparation de domicile. Il constate la résidence séparée dans la majorité des cas. Au besoin, il décide lequel des deux époux doit partir. Car un des problèmes souvent rencontrés est que ni l’un ni l’autre ne veut céder sur la résidence : « c’est chez moi, j’y suis, j’y reste ! ». Sauf qu’à ce compte-là, c’est le début de l’enfer pour beaucoup de couples. Sans aller jusqu’à vivre des situations mises en scène dans La Guerre des Rose (ce film de Danny de Vito avec Kathleen Turner et Michael Douglas), la cohabitation peut vite devenir insupportable et dégénérer.
Après que l’un des deux époux a effectué un premier rendez-vous avec un avocat, celui-ci envoie un courrier au conjoint pour lui indiquer que son époux(se) souhaite introduire une procédure de divorce à l’amiable et pour lui demander les coordonnées de son propre avocat. Les deux avocats peuvent alors rapidement rédiger un document permettant aux époux de se séparer et dans lequel il est précisé que celui qui reste dans le domicile s’engage à ne pas reprocher à celui qui part un abandon de domicile conjugal dans le cadre de la procédure de divorce. Un divorce est quoi qu’il arrive toujours assez inconfortable, inutile d’en rajouter ! Vivre séparément, chacun chez soi, avec un semblant de calme… Ne serait-ce pas déjà le début de la fin des problèmes d’un couple en perdition ?