Les pensions alimentaires peuvent faire l’objet d’une décision de justice ou d’une convention judiciairement homologuée, mais elles sont aussi souvent décidées entre les deux parents sans qu’aucun document ne soit signé. Mais dans tous les cas, lorsque le parent débiteur ne s’acquitte plus de son dû – en totalité ou partiellement – la situation peut vite devenir critique pour le parent qui s’occupe des enfants. De nouvelles solutions viennent d’entrer en vigueur pour renforcer un système parfois encore imparfait.
D’octobre 2014 à avril 2016, le mécanisme de renforcement des garanties contre les impayés de pensions alimentaires a d’abord été expérimenté dans vingt départements. Il a été partiellement généralisé le 1er avril 2016. L’objectif est bien de renforcer l’Allocation de soutien familial (ASF) versé au parent qui élève seul son enfant lorsque l’autre parent ne s’acquitte pas (ou pas complètement) de la pension alimentaire. L’intérêt de ce mécanisme est double. Tout d’abord il prend en compte les cas où les couples n’ont pas de décision judiciaire. Car lorsqu’il y a une décision de justice ou une convention homologuée, la machine peut se mettre en marche et on peut par exemple mettre en place une procédure d’exécution forcée comme une procédure de paiement direct ou de saisie sur salaire. Plusieurs autre méthodes de recouvrement existent déjà, dont l’ASF, versée par la CAF, mais dont on ne pouvait bénéficier jusque là que si le montant de la pension alimentaire avaient été établie par décision judiciaire. Mais lorsque le parent débiteur est parti sans laisser d’adresse et/ou qu’aucune décision judiciaire ne fixait le montant de la pension, nous étions alors face à une faille du système que le récent texte vient colmater. En dehors de toute décision judiciaire, il fallait trouver un moyen d’aider le parent créancier et de contraindre le parent débiteur.
Par ailleurs, et toujours dans cette idée d’apporter une réponse utile, efficace et rapide, le texte prévoit un partage d’informations entre les différents organismes quant à la situation financière et à la solvabilité du parent mauvais payeur. Là encore, c’est une nouveauté qui doit permettre à la justice de statuer dans les meilleurs délais, évitant au parent isolé des mois de carence, d’autant qu’il s’agit bien souvent de personnes pour qui cette pension est nécessaire pour boucler les fins de mois et subvenir aux besoins des enfants.
Parent « Hors d’état »
Concrètement, il suffit désormais d’un mois de non participation à l’entretien de l’enfant, et non plus deux, pour que le parent créancier bénéficie de l’ASF, soit 104,75 € par mois et par enfant. Et cette aide s’applique donc également lorsqu’il n’y a pas de décision de justice. L’ASF est prévue pour ne durer que quatre mois, période pendant laquelle l’organisme débiteur des prestations familiales contrôle la solvabilité du parent défaillant et transmet les informations à l’autorité judiciaire.
Dans le cas où, à l’issue du contrôle, le parent est considéré « hors d’état »* de faire face à son obligation d’entretien ou au versement d’une pension alimentaire, l’ASF se poursuit au-delà du 4e mois. La situation du parent débiteur fera alors l’objet d’un contrôle au moins une fois par an et l’aide pourra ainsi être réajustée en fonction d’un changement de situation.
Par ailleurs, le décret prévoit également la mise en place d’une allocation différentielle dans le cas où le parent débiteur s’acquitterai de l’intégralité de la pension, mais que celle-ci resterait inférieure à l’ASF. Pour éviter les abus – certains pourraient être tentés de convenir d’un montant purement symbolique comptant sur l’allocation pour atteindre une somme raisonnable – un montant minimum en fonction des ressources du débiteur et du nombre d’enfants est également prévu.
Toutes ce dispositions ont vocation à réduire les délais, éviter les frais de citation par huissier en cas d’adresse erronée, mais aussi et surtout à pénaliser le moins possible le parent créancier.
* Est considéré comme étant « hors d’état » le débiteur qui se trouve dans l’une ou l’autre des situations suivantes (art. D. 523-2) :
« 1° Débiteur sans adresse connue ;
2° Débiteur réputé insolvable lorsque :
a) Il est bénéficiaire du revenu de solidarité active mentionné à l’article L. 262-2 du code de l’action sociale et des familles, y compris en cas de cumul de cette prestation avec la prime d’activité mentionnée à l’article L. 841-1 du code de la sécurité sociale ou bénéficiaire du revenu de solidarité mentionné à l’article L. 522-14 du code de l’action sociale et des familles, applicable à la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, La Réunion, Saint-Martin, Saint-Barthélemy et Saint-Pierre-et-Miquelon ;
b) Il dispose de ressources inférieures au montant forfaitaire du revenu de solidarité active mentionné à l’article L. 262-2 du code de l’action sociale et des familles fixé pour un foyer composé d’une seule personne ;
c) La totalité de ses revenus est insaisissable ;
d) Il est bénéficiaire de l’allocation aux adultes handicapés à taux plein ou versée en complément d’un avantage de vieillesse ou d’invalidité ;
e) Une décision de justice a suspendu le versement de la pension alimentaire déjà mise à sa charge ou n’a pas fixé le montant de l’obligation d’entretien pour des motifs reposant sur la faiblesse ou l’absence de ses ressources ou l’absence d’éléments concernant sa situation ;
f) Il est incarcéré y compris dans le cadre de placement à l’extérieur et à l’exclusion du régime de semi-liberté ;
g) Il est bénéficiaire de l’allocation de solidarité spécifique prévue à l’article L. 5423-1 du code du travail, ou de l’allocation temporaire d’attente prévue à l’article L. 5423-8 du même code ;
h) Il est parent mineur ;
i) Il est sans domicile fixe sans ressources ou est bénéficiaire de l’une des prestations sociales mentionnées au a, b, d et g ci-dessus ;
j) Il a confié son enfant à une personne ou un couple dans le cadre d’une décision judiciaire de recueil légal, autrement dénommée “Kafala” ;
k) Il est impossible d’établir sa solvabilité en raison de l’absence d’éléments identifiés lors du contrôle sur son domicile ou sur sa situation financière ;
3° Débiteur ayant fait l’objet d’une plainte déposée à la suite de menaces, de violences volontaires sur le parent ou l’enfant, de condamnations pour de telles violences ou en cas de violences mentionnées dans une décision de justice ;
4° Débiteur domicilié ou ayant sa résidence habituelle dans le pays d’origine du créancier qui a obtenu la qualité de réfugié sur le territoire.